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Dans la nuit du 17 au 18 avril 2025, un seuil supplémentaire a été franchi dans la violence visant les agents du transport de fonds. À Échenevex, dans l’Ain, trois individus ont pénétré le domicile d’un convoyeur pendant son absence. Ils ont enlevé sa compagne et leur fille de 21 mois pour tenter d’obtenir des informations sur sa tournée en Suisse. Objectif : détourner le fourgon et son contenu.
Le scénario glace.
Peu avant 4h du matin, une alerte vidéo s’affiche sur le téléphone du convoyeur. Trois silhouettes cagoulées s’introduisent chez lui. Il tente de joindre sa femme. Pas de réponse.
Puis l’appel arrive : les malfaiteurs l’informent qu’elles sont entre leurs mains. Ils exigent des détails sur le fourgon, le trajet, la cargaison. S’il dévie, s’il parle, il prend le risque d’un drame familial.
Le père garde son sang-froid. Il prévient discrètement les autorités suisses. Celles-ci transmettent aussitôt à la gendarmerie française. Les enquêteurs enclenchent une opération discrète.
Deux vies abandonnées au bord de la route
À 6h, la femme et l’enfant sont retrouvées, saines et sauves, à une centaine de kilomètres du domicile familial. C’est un automobiliste qui donne l’alerte. Aucun coup, pas de trace visible de violences. Mais un traumatisme certain, pour elles comme pour leur entourage.
Une attaque préméditée, une méthode connue
L’enquête, confiée à la DNPJ et à l’OCLCO sous l’autorité de la JIRS de Lyon, a été ouverte pour enlèvement, séquestration en bande organisée, tentative de vol et association de malfaiteurs. Trois suspects sont toujours en fuite.
Ce mode opératoire – faire pression sur un convoyeur via ses proches – n’est pas nouveau, mais il reste rare. Et il inquiète.
« C’est le signal d’une escalade. »
John Monfray, délégué FO chez Loomis, alerte : « On sent que la violence est à son maximum. Il y a eu plusieurs tentatives sur nos fourgons, mais aussi des attaques ciblées dans le transport de métaux précieux. Maintenant, on vise les familles. »
En octobre dernier, à Grenoble, c’est un fourgon blindé qui était attaqué en pleine ville. Cette fois, c’est la cellule familiale qu’on prend pour cible.
La question n’est plus de savoir si le métier est dangereux. Mais jusqu’où les groupes criminels sont prêts à aller pour accéder à l’argent.
Les réseaux sociaux, faille silencieuse de la sécurité physique
Dans cette affaire, comme dans d’autres, une hypothèse glaçante reste en toile de fond : et si les malfaiteurs avaient préparé leur coup en ligne ?
Facebook, Instagram, LinkedIn… Ces plateformes sont devenues des mines d’or pour qui veut collecter des informations sur un salarié, son employeur, son rythme de travail… voire sa vie privée.
Trop souvent, des convoyeurs affichent sans retenue leur appartenance à une société, leur ville de résidence ou leur dernière mission. Certains exposent même leur véhicule de fonction, leur tenue, et parfois – pire – leur foyer. Dans un secteur aussi sensible que le transport de fonds, cela équivaut à laisser la porte entrouverte aux repérages.
Dans le cas d’Échenevex, aucune information officielle ne confirme l’origine des renseignements ayant permis l’enlèvement. Mais une chose est certaine : les criminels n'ont plus besoin de filatures physiques quand les données personnelles sont en libre accès.
Il est temps que les entreprises du secteur prennent à bras-le-corps cette vulnérabilité. Et que les agents soient formés, au même titre que pour la protection physique, à la cybersécurité personnelle.
✅ À retenir
- Trois malfaiteurs ont enlevé la femme et la fille d’un convoyeur de fonds à Échenevex (Ain) pour tenter de détourner un fourgon.
- La séquestration a duré près de deux heures, avant que les deux victimes ne soient retrouvées indemnes à 100 km de là.
- L’enquête a été confiée à la JIRS de Lyon, avec plusieurs qualifications criminelles lourdes.
- Cette affaire s’inscrit dans un contexte de violences croissantes contre les professionnels du transport de fonds.
- Les suspects sont toujours en fuite.
- Les réseaux sociaux représentent une faille de sécurité ignorée par beaucoup dans la profession.