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C’est une communication politique comme on en voit souvent : un tableau coloré, des comparaisons rapides entre le GPSR et la sécurité privée, et une conclusion simpliste.
Problème : les affirmations de Céline Malaisé, présidente du groupe des élu·es communistes, écologistes et citoyens d’Île-de-France, sont juridiquement fausses sur plusieurs points.
Et quand on parle du droit des agents de sécurité, la rigueur n’est pas une option.

La vidéo complète à l’origine de ce visuel est consultable ci-dessous.
❌ "Les agents de sécurité privée n’ont pas le droit à l’éviction"
C’est faux.
Le droit existe déjà : il est inscrit noir sur blanc dans l’article L2241-6 du Code des transports.
"Toute personne qui adopte dans un véhicule de transport ou dans les espaces affectés au transport public un comportement de nature à compromettre la sécurité ou le bon ordre [...] peut se voir interdire par les agents mentionnés au I de l’article L2241-1 et par les agents exerçant l’activité mentionnée au 1° de l’article L611-1 du Code de la sécurité intérieure au profit d’un opérateur de transport public de personnes, l’accès au véhicule de transport, même munie d’un titre de transport valide.
Le cas échéant, elle peut se voir enjoindre par ces mêmes agents de descendre du véhicule de transport ferroviaire ou routier au premier point d’arrêt suivant la constatation des faits ou de quitter sans délai les espaces, gares ou stations gérés par l’exploitant du réseau de transport public."
En clair : les agents de sécurité privée ont déjà ce droit d’éviction, au même titre que les agents internes (GPSR, Suge).
La seule condition manquante ? Le décret en Conseil d’État précisant la formation et l’autorisation de ces agents.
"Les modalités de formation et d’autorisation des agents exerçant l’activité mentionnée au 1° de l’article L611-1 [...] sont précisées par décret en Conseil d’État."
Autrement dit : le droit existe, mais son application est suspendue à un texte réglementaire. Ce n’est donc pas une inexistence du droit, mais une carence administrative.
👉 Voir l’analyse complète sur 83-629.fr :
https://www.83-629.fr/droit-a-leviction-dans-les-transports-vers-une-extension-aux-agents-de-securite-privee/
🔫 Le port d’arme : un cadre strict, mais réel
Autre affirmation erronée : selon Céline Malaisé, les agents privés n’auraient pas le droit au port d’arme.
Là encore, c’est faux.
Les textes du Code de la sécurité intérieure sont explicites :
- Articles L613-12 à L613-15 (missions armées)
- Articles R613-1 à R613-24 (conditions, armes, entraînement)
Les agents peuvent être dotés :
- d’armes de catégorie D non létales (tonfa, bâton télescopique, aérosols incapacitants ≤ 100 ml),
- d’armes de catégorie B (armes de poing), selon les besoins de la mission et l’autorisation préfectorale.
La formation est plus complète que celle du GPSR :
- 175 h de formation commune + 139 h spécifiques aux catégories B et D.
Le GPSR, lui, n’impose "que" 158 h (arrêté du 28 septembre 2016).
Et côté entraînement :
- GPSR : 2 séances de tir par an (25 cartouches chacune) + 2 séances de bâton.
- Sécurité privée : 4 séances par an (30 cartouches chacune) + 2 séances pour le bâton/lacrymogène
Sur le plan réglementaire, la sécurité privée est donc au moins aussi encadrée que les services internes armés de la RATP.
🤝 La palpation de sécurité : encadrée mais autorisée
Céline Malaisé omet également un texte fondamental : l’article L613-2 du CSI.
"Les personnes physiques exerçant l’activité mentionnée au 1° de l’article L611-1 peuvent, en cas de circonstances particulières liées à l’existence de menaces graves pour la sécurité publique, procéder, avec le consentement exprès des personnes, à des palpations de sécurité."
Ces palpations ne peuvent être réalisées que :
- par une personne du même sexe,
- dans les lieux ou périodes fixés par arrêté préfectoral,
- et avec consentement exprès.
C’est une compétence légale, activable sur décision du préfet, comme pour le GPSR.
🚔 L’appréhension d’un individu : un droit, strictement encadré
Enfin, la communication de Mme Malaisé semble ignorer que les agents de sécurité privée peuvent appréhender un auteur de crime ou délit flagrant, conformément à l’article 73 du Code de procédure pénale.
Le Code de la sécurité intérieure encadre cette possibilité :
Article R631-10 CSI :
"Un acteur de la sécurité privée qui appréhende l'auteur d'un crime ou d'un délit flagrant puni d'une peine d'emprisonnement en application de l'article 73 du code de procédure pénale ne peut retenir la personne mise en cause sans en aviser sans délai les services de police ou de gendarmerie territorialement compétents.
Avant la présentation aux services de police ou de gendarmerie, la personne interpellée reste sous la surveillance et la protection de celui qui l'a interpellée. Elle ne doit alors subir aucune violence ni humiliation ou traitement contraire à la dignité humaine."
Les règles sont strictes : information immédiate des forces de l’ordre, respect de la dignité, assistance médicale en cas de besoin.
Mais ce droit existe, tout comme pour le GPSR.
Une communication politique simpliste, aux effets dangereux
Céline Malaisé prétend défendre le service public.
Mais en niant les prérogatives légales des agents de sécurité privée, elle désinforme le public et décrédibilise tout un secteur.
- Oui, les agents privés peuvent procéder à des évictions (L2241-6 CT) ;
- Oui, ils peuvent être armés (L613-12 et suiv. CSI) ;
- Oui, ils peuvent réaliser des palpations (L613-2 CSI) ;
- Oui, ils peuvent appréhender un auteur en flagrant délit (art. 73 CPP).
La différence ? Le GPSR est un service interne, la sécurité privée est externalisée.
Mais les textes existent, les droits existent, seuls les décrets manquent parfois à la mise en œuvre.
À retenir
✅ Droit d’éviction : existe déjà (L2241-6 Code des transports) - en attente du décret précisant la formation.
✅ Port d’arme : autorisable (L613-12 et suiv. CSI ; décret 2017-1844) - sous conditions préfectorales.
✅ Palpation : possible avec autorisation préfectorale (L613-2 CSI).
✅ Arrestation : autorisée dans le cadre de l’article 73 CPP, encadrée par R631-10 CSI.
✅ Le tableau de Mme Malaisé véhicule des erreurs factuelles et une vision réductrice du métier.