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Une société de télésurveillance, qui exerce une activité privée de sécurité consistant à surveiller à distance des biens meubles ou immeubles, a contacté à plusieurs occasions les forces de l’ordre en raison de déclenchements d’alarmes survenus chez ses clients.
Après plusieurs appels infructueux, un alarme est dirigée automatiquement vers un opérateur qui dépêche alors un agent de sécurité sur place et informe parallèlement les forces de l’ordre en leur transmettant un message préenregistré dont le contenu est différent selon qu’il s’agisse d’un code ” intrusion ” ou ” alerte “.
L’article L. 613-6 du code de la sécurité intérieure impose aux sociétés de surveillance à distance de biens meubles ou immeubles d’effectuer, avant tout appel aux forces de l’ordre, une levée de doute consistant en un ensemble de vérifications, ce qui implique notamment, selon les cas, de conduire la levée de doute en plusieurs étapes tenant compte de l’extrême sensibilité des détecteurs utilisés pour les systèmes d’alarmes qui engendre de nombreux déclenchements intempestifs.
Le préfet de la zone de défense et de sécurité Nord a prononcé des sanctions pécuniaires à son encontre au motif que certains de ces appels téléphoniques étaient injustifiés, d’un montant de 1 050 euros.
Ce qu’a voulu justifier la société de télésurveillance:
– Que les forces de l’ordre sont intervenues de leur propre initiative sur les lieux après ses appels,
– Qu’en l’absence d’appel aux forces de l’ordre, sa responsabilité pénale aurait pu être engagée sur le fondement des articles 223-1, 223-5 et 223-6 du code pénal réprimant la mise en danger des personnes,
– Un principe constitutionnel de précaution
– Seulement 0,36 % des dossiers qu’elle a traités dans le Pas-de-Calais auraient entraîné un appel des forces de l’ordre,
Mais pour la justice …
– les forces de l’ordre sont intervenues de leur propre initiative sur les lieux après ses appels, mais cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé des sanctions prononcées à son encontre, dès lors qu’il est reproché à la société de n’avoir pas effectué une levée de doute conforme aux prescriptions légales et qu’une telle levée de doute doit précéder tout appel aux forces de l’ordre.
– si le centre de télésurveillance soutient qu’en l’absence d’appel aux forces de l’ordre, sa responsabilité pénale aurait pu être engagée (articles 223-1, 223-5 et 223-6 du code pénal) réprimant la mise en danger des personnes, cette circonstance ne saurait justifier, pour une société dont l’activité consiste à surveiller à distance des biens meubles ou immeubles, un appel systématique en cas de déclenchement d’une alarme chez l’un de ses clients.
– Aucun principe constitutionnel de précaution ne régit l’activité de télésurveillance . Le moyen tiré de la méconnaissance d’un tel principe dans le cas où la société se serait abstenue de contacter les forces de l’ordre est donc inopérant.
– Le centre de télésurveillance ne peut utilement invoquer la circonstance qu’entre 2014 et 2018, seulement 0,36 % des dossiers qu’elle a traités dans le Pas-de-Calais auraient entraîné un appel des forces de l’ordre, pour s’exonérer du respect des dispositions de l’article L. 613-6 du code de la sécurité intérieure.
Source: CAA de DOUAI, 1ère chambre, 15/09/2020, 19DA00513, Inédit au recueil Lebon