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Suite à l’incident dans un Décathlon relaté sur Twitter (cliquez ici) , où il apparaît à priori que le 8 septembre, un client accusé à tort de vol assure avoir été ramené de force et maintenu à l’intérieur d’un magasin par un agent de sécurité, suite à un portique qui a sonné.
Avec le peu d’information, et un parti-pris du journaliste contre l’agent de sécurité en ne prenant en compte que la version de la personne accusé de vol, il est difficile de trancher si l’agent avait tord ou non.
Mise à part cela, on peut déjà répondre à plusieurs questions, avec des réponses glanées ici ou là souvent erroné:
Le terme interpeller, arrêter ou appréhender, c’est hyper important !
Faux.
Je vous invite d’ailleurs à lire cet article: CLIQUEZ-ICI
En résumé, interpellé, c’est à la voix. “Hey toi là-bas !” = c’est interpeller la personne.
Arrêté ou appréhender une personne, c’est le même but: retirer à une personne sa liberté d’aller et venir
Après dans le langage courant en sécurité privée, on parle souvent d’interpel’. Ce qui n’est pas faux, car il est rare d’appliquer l’article 73 du CPP. Car je vous rappel que vous appliquez l’article 73 UNIQUEMENT lorsque vous lui enlevé sa liberté d’aller et venir. S’il coopère pour vous suivre, si vous ne l’enfermé pas … Vous ne l’appréhendez pas , mais vous l’avez interpellé ! Car c’est important de le rappeler, si vous appréhender une personne, il y a nécessairement et obligatoirement un appel aux forces de l’ordre à faire (qu’il soit mineur ou pas).
L’agent de sécurité n’a pas le droit d’appréhender une personne sur la voie publique !
Faux.
Si l’exercice d’une mission de sécurité privée est en effet, de manière générale, cantonné à un établissement ou des locaux, elle peut s’effectuer sur la voie publique avec une autorisation préfectorale.
Or, appliquer le droit d’appréhender une personne, conforme à l’article 73 du CPP, est utilisable par tous, tant que cela reste dans le cadre légal de cet article. Ce n’est pas une spécificité ou un droit particulier pour les agents de sécurité, c’est un droit pour tous les citoyens, donc à fortiori pour un agent de sécurité.
Donc que l’article 73 du CPP soit appliqué au sein d’un magasin, dans la rue ou encore au domicile d’une personne … cela reste le même cadre légal, peu importe que la personne qui effectue ce droit soit un éboueur ou un agent de sécurité.
Je rajouterais même plus, un agent de sécurité qui applique l’article 73 du CPP, à des devoirs en plus qu’un simple citoyen concernant la protection et la sécurité de la personne appréhendé (voir l’article R631-10 du CSI)
Une belle action récente pour illustrer mon propos : le cas de l’agent de sécurité qui intervient sur la voie publique suite à des agressions au tournevis à Nantes puis appréhende l’auteur sur la voie publique ( https://www.83-629.fr/2021/06/attaque-au-tournevis-a-nantes-un-agent-de-securite-sauve-des-passants-avec-une-bombe-lacrymogene.html )
Un autre exemple: Une personne qui vol une XBOX dans un hypermarché, s’enfuit à travers les caisses, puis continue de courir sur la voie publique, oui un agent de sécurité (ou tout autre citoyen) à le droit d’appliquer l’article 73 du CPP. Il n’existe pas un “mur invisible” empêchant à un citoyen (qui exerce une mission de sécurité privée) d’appliquer un droit commun, que ce soit sur la voie publique, un camping ou encore un domicile.
Un portique qui sonne, place t’il l’agent de sécurité dans le cadre du flagrant délit ?
En effet, l’article de presse sur cette “interpellation” dans un Décathlon relaté sur Twitter (cliquez ici), parle de l’action de l’agent de sécurité : “Le vigile m’appelle dans la rue et me dit que le portique a sonné (…)”
C’EST ÇA LA QUESTION CRUCIALE ! Étions-nous dans le cadre de l’article 73 du CPP ? Car cela aurait rendu les actions de cet agent de sécurité en total accord avec l’esprit du cadre légal de l’article 73 du CPP, que ce soit sur la voie publique ou dans le magasin d’ailleurs.
Un portique qui sonne = flagrant délit ?
Le déclenchement de l’alarme d’un portique ne peut suffire à lui seul à permettre le recours à la force qu’autorise l’art.73 CPP pour l’appréhension de l’auteur d’une infraction flagrante. La jurisprudence considère à juste titre que la flagrance justifiant la coercition suppose notamment que l’infraction soit manifeste : il faut qu’il y ait “les indices apparents d’un comportement délictueux”.
Cette condition n’est pas remplie si les signes sont équivoques, c’est-à-dire que, même s’ils sont compatibles avec la commission d’une infraction, ils sont aussi susceptibles d’être étranger à tout acte délictueux.
Or, c’est le cas de l’alarme du portique qui peut aussi bien se déclencher à cause d’un défaut du portique anti-vol ou encore lié à une perturbation électromagnétique (téléphone ou autres objets) ou encore le port par la personne d’un article acheté ailleurs, mais dont l’antivol n’a pas été désactivé.
Pour que l’appréhension pratiquée en l’occurrence par l’agent de sécurité soit justifiée par la flagrance, il aurait fallu que d’autres indices que le déclenchement de l’alarme l’ait alerté, par exemple le fait d’entrevoir sous les vêtements du suspect une marchandise proposée ou encore un comportement en lien (s’enfuit après avoir sonné, etc.) , ce qui aurait rendu vraisemblable le défaut de paiement à la caisse.
BILAN
Si l’agent est intervenu en accord avec l’article 73 du CPP, oui, il avait le droit d’aller chercher la personne même sur la voie publique et de le ramener au PC Sécurité pour le protéger en premier lieu (regard, vidéo, moquerie, humiliation, respect de sa dignité, …) en attendant les forces de l’ordre.
Par contre si l’agent de sécurité à “de force” imposé à la personne de le suivre jusqu’au PC Sécurité, alors l’agent de sécurité se plaçait dans le cadre juridique du 73 du CPP, et imposait de ce fait un appel aux forces de l’ordre immédiatement (conformément à notre code de déontologie). Ce qu’il n’a pas fait à priori.
Les bonnes règles à appliquer si un portique sonne:
- Si vous n’êtes pas sûr à 100%, le doute doit profiter à l’individu. Vous ne faites rien.
- Si vous appliquez l’article 73 du CPP = il faut appeler sans délai les forces de l’ordre, avant même de savoir si la personne avait vraiment ou pas un article volé sur lui.
- Bien vérifier les portiques à chaque demi-journée : faire le tour des portiques et passé un antivol pour vérifier son bon fonctionnement = cela vous servira pour “prouver” que vous étiez de bonne foi en vous donnant un argument de poids sur la fiabilité du portique (il est testé deux fois par jour !) . Pour écarter (un peu) l’excuse d’un portique défectueux pour ne pas appliquer l’article 73 du CPP.